17 septembre > 2 novembre 2014
La présentation d’une quarantaine d’œuvres en Lap (1923-1937) – panneaux décoratifs à plat ou bas-reliefs – ainsi que de documents d’archives et de photographies évoquant l’histoire de la manufacture d’art dirigée par la famille Séailles, permet de découvrir l’aventure technique et artistique de cet étonnant dérivé du ciment.
Le Lap est une invention de l’ingénieur Jean Charles Séailles (1883-1967) et de son épouse, la cantatrice et peintre Speranza Calo-Séailles (1885-1949), tous deux issus de familles d’artistes.
C’est en faisant tomber par inadvertance du ciment dans le verre où elle rince ses pinceaux que Speranza Calo-Séailles remarque sa cristallisation avec les couleurs. Le couple comprend l’importance de cette découverte qui va embellir le ciment en le revêtant d’« émaux » aux teintes variées et éclatantes et permettre la décoration de ce matériau emblématique de la période Art déco.
Après quelques expérimentations, les époux Séailles créent à Paris en 1924 la société du Lap.
Le Lap est présenté à l’Exposition internationale des arts décoratifs de 1925. Le décorateur Ruhlmann est l’un des premiers à l’employer pour les revêtements muraux de la salle à manger d’un des pavillons de cette exposition.
Jean Charles Séailles lance la production industrielle de son produit sous forme de dalles et lambris destinés à l’architecture intérieure et extérieure. Il est ainsi utilisé pour la confection des devantures des magasins de vins Nicolas dessinés dès 1926 par l’architecte Patout, ou pour l’habillage des piliers du restaurant La Coupole à Paris. Des artistes et des architectes, convaincus de l’intérêt de l’emploi du Lap dans la décoration urbaine, l’emploient sur leurs chantiers : Leyritz utilise en 1926 des panneaux de Lap bleu dans la composition de la devanture du fleuriste Baumann.
Parallèlement au développement architectural, le couple Séailles s’intéresse au potentiel artistique de son invention. Vers 1924, Speranza Calo-Séailles crée un atelier artisanal sur la propriété d’Antony et incite de nombreux artistes à lui fournir des compositions, dont les plus célèbres sont : Dufy, Foujita, Gruber, Jourdain, Jouve, Leyritz, Magne, les frères Martel, Marty, Mingret. Traduisant l’esprit décoratif de chacun, elle reproduit les lignes des cartons fournis par les peintres, puis dispose les couleurs avec son talent et ses connaissances du matériau, joue avec les brillants et la lumière. Une fine couche de ciment spécial est ensuite délicatement coulée sur le travail réalisé. Les productions originales, d’une valeur picturale incomparable, apparaissent alors sous forme de panneaux et de bas-reliefs uniques.
Le Lap a connu un épanouissement certain mais de courte durée dans des emplois diversifiés ; le monde artistique en particulier a su bénéficier pleinement de ses possibilités. Mais les contrecoups de la Grande crise des années 1930 et la seconde guerre mondiale mirent un coup d’arrêt aux développements de ce matériau prometteur.